Appel
Aux citoyennes et citoyens soucieux de l’avenir de leurs enfants et de l’équilibre de notre écosystème,
Aux architectes,
Aux urbanistes,
Aux ingénieurs,
Aux maalems,
Aux ouvriers,
Aux promoteurs,
Aux entreprises,
Aux responsables de l’aménagement du territoire, Aux représentants de la société civile,
Aux législateurs,
Aux politiciens,
Aux Jeunes.
« Pour construire un logement rapidement, écologique, durable, consommant très peu d’énergie (ni chauffage, ni climatisation) avec des moyens et des techniques locaux. »
Face aux catastrophes naturelles (vagues de froid, canicules, incendies,…) et à la crise énergétique que traverse notre pays, il devient évident que le mode constructif dominant en Tunisie depuis une cinquantaine d’années, est quasi totalement inadapté aux contextes climatologiques et géologiques spécifiques aux différentes régions. La Tunisie ne peut plus supporter un déficit énergétique, donc économique, aussi croissant d’année en année.
Nous, architectes, avons le devoir éthique et professionnel de contribuer à une remise en question quasi-totale des techniques constructives actuelles.
Le tunisien(ne) d’aujourd’hui n’a plus les moyens financiers de payer une facture STEG disproportionnée, alors que les solutions alternatives existent, et ce, à un niveau local.
Oui,
1. La chaux de Thala1 au lieu du ciment :
Sur n’importe quelle zone du territoire tunisien, il est possible de construire à la chaux de Thala (monter la maçonnerie, enduire, couler une chape, couler des fondations, couler un linteau, etc.), moins chère que le ciment2 (prix environ -20%), plus écologique (énergie grise -50%) et plus durable (la NHL3 a un excellent comportement thermique et hygrométrique). De plus, la construction avec la chaux permet de renforcer une industrie locale (le CaCO3 est extrait de la carrière, puis cuit en fourneau, ensuite micronisé pour être enfin conditionné en sac de 25kg ; respect de la pénibilité au travail) et de réduire l’impact de la balance commerciale d’importation (la production du ciment nécessite l’importation du Clinker4). L’utilisation de la chaux (100% locale) dans nos constructions nous permet donc de réduire notre dépendance énergétique et d’améliorer la qualité de l’air intérieur au niveau des bâtiments (moins de dégagement de formaldéhyde), tout en conservant la résistance mécanique des structures.
2. La voûte au lieu de la dalle :
30% des déperditions énergétiques5 se font par le couvrement (c’est-à-dire la partie qui clos le volume par le haut). Aujourd’hui, la dalle est le couvrement le plus utilisé à travers le monde. Toutefois, c’est un système constructif qui exige un coffrage (lourd en temps d’immobilisation et de matériaux) et des frais en aciers et en ciment. La dalle nous maintient « esclaves » de deux marchés mondiaux : celui de la sidérurgie et celui du ciment.
La voûte est une solution alternative. Elle ne nécessite aucun coffrage, pas de ferraillage, ni ciment. Elle est exposée, alternativement, au soleil, vue sa géométrie variable. Ce qui fait que la déperdition énergétique est réduite. De plus, la forme même de la voûte génère des différences de niveaux, donc des différences de pression de l’air ambiant. Ce qui entraîne une facilitation de la remontée de l’air vers le haut de la voûte, donc une ventilation naturelle. Cette question de ventilation naturelle peut être renforcée par des dispositifs plus complexes comme le Malqaf (tour à vent). Un dispositif qui permet le renouvellement de l’air continu et une extraction de l’air chaud et vicié. Selon les moyens, une VMC (Ventilation Mécanique Contrôlée) peut y être installée pour augmenter la vitesse et le volume de circulation de l’air. Les briques utilisées pour monter les voûtes peuvent être en briques cuites rouge (énergivores) de 6T. Mais elles peuvent être également montées avec la brique locale de Tozeur ou autres briques de béton cellulaire (à base de NHL). Enfin, le mortier de pose des briques sera le plâtre. Un double rouleau est recommandé pour consolider la voûte, mais également, pour améliorer sa performance thermique. Ce double rouleau peut être réalisé avec un tout venant in situ légèrement stabilisé (Massouss) à la NHL.
3. La brique BTC (Bloc de Terre Comprimée) au lieu de la brique cuite 12T ou du béton armé :
La machine qui produit les briques BTC (unité tractable de BTC de la société SOIB: http://www.soib.com.tn/index.php/produits) peut être louée ou achetée donc utilisée sur place avec la terre locale. Par conséquent, il y a gain au niveau du transport (par rapport à une construction en ciment qui nécessite plusieurs voyages d’acheminement du béton et du ciment). Il y a également une diminution accrue de la pollution de l’air.
Un mur en briques BTC a un coefficient thermique entre 4 et 5 fois plus performant qu’un mur en brique cuite 12T ou un mur en béton armé, ce qui permet d’économiser au niveau des factures STEG pour le chauffage et la climatisation.
La construction des murs en BTC permet également de développer une niche économique locale et une formation professionnelle ciblée selon les besoins des localités et les niveaux de savoir-faire (architectes, ingénieurs, maçons, fabricants, applicateurs, etc.).
4. Le plâtre projeté au lieu de l’enduit ciment intérieur :
Il est également possible d’enduire au plâtre projeté et participer ainsi au développement d’une niche technique et économique, sur tout le territoire, en formant des applicateurs de cet enduit dont les propriétés thermiques, hygrométriques, ignifuges et esthétiques sont prouvées, certifiées et attestées. Sachant que la Tunisie possède le 4ème plus grand gisement mondial de Gypse.
5. Récupération-Réutilisation-Recyclage:
La récupération et la réutilisation de l’eau pluviale par la création de citernes (فسقیة).
La réutilisation et le recyclage des déchets organiques ménagers et alimentaires (restaurants / hôtels) par le compostage ; cela réduit le volume des déchets et de la pollution dans nos villes et crée une possibilité de la transformation de ce compostage dans l’agriculture (engrais bio).
– Fondations en NHL 3,5 au lieu du ciment usuel,
– Murs porteurs périphériques en BTC : bonnes performances thermiques et hygrométriques + ignifuge (résistance au feu),
– Couvrement en voûte surbaissée en brique cuite 6T + double rouleau au béton de NHL cellulaire,
– Réduire les ouvertures Sud et Ouest (simulation à réaliser en s’adaptant au diagramme solaire6 de chaque zone avec la prise en compte de l’angle solaire selon les saisons : afin de privilégier l’apport en lumière tout en évitant la surchauffe),
– Favoriser les ouvertures Est,
– Disposer les ouvertures en vis à vis pour créer des courants d’air,
– Aménager des petites ouvertures hautes sous voûtes pour favoriser la ventilation naturelle l’été, par effet cheminée (VH : ventilation haute),
– Aménager des petites ouvertures basses (VB : ventilation basse),
– Revêtement de sol en déchets de marbre récupérés gratuitement (ou à des prix très intéressants) chez les marbriers,
– Enduit intérieur en plâtre projeté : confort thermique, hygrométrique et ignifuge,
– Enduit extérieur en NHL 3,5 de Thala,
– Menuiseries aluminium périphériques : standardiser les formats pour réduire les coûts, double vitrage de préférence,
– Menuiseries bois intérieures : réduire le nombre de portes et de couloirs, standardiser les formats pour réduire les coûts,
– Installation électrique apparente,
– Installation de plomberie apparente,
– Eclairage naturel favorisé, éclairage artificiel indirect, éviter les suspensions, favoriser les appliques murales indirectes,
– Installer une citerne souterraine de récupération des eaux pluviales,
– Installer une unité de compostage : transformation des déchets alimentaires en engrais biologiques,
– Regrouper plusieurs logements pour optimiser les rendements des panneaux PV (l’objectif étant d’arriver à la possibilité de créer une unité pour 100 habitants).
Ces quelques recommandations sont basées sur des expériences déjà exécutées et concluantes, réalisées avec des concepteurs, prescripteurs, fournisseurs et artisans locaux.