Le 18 septembre 2023 marquera sans doute une date emblématique pour la Tunisie et pour l’île de Djerba en particulier. Lors de la 45ème session du comité du patrimoine mondial tenue à Riyadh, en Arabie Saoudite, un ensemble de biens en série de l’île de Djerba a été officiellement inscrite à la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO. Une reconnaissance attendue et méritée pour l’île, riche de son histoire, son architecture, son caractère pluriconfessionnel et son mode d’établissement humain insulaire et ingénieux, adapté aux contraintes du climat et aux menaces maritimes.
Le dossier présenté par le Ministère des Affaires culturelles, engagés depuis plus de 10 ans dans un processus d’inscription rigoureux et exigeant et élaboré minutieusement par une équipe d’experts tunisiens, englobe 7 zones de l’île et 24 monuments historiques disséminés à travers l’île, empreints d’un caractère exceptionnel tant architectural que paysager. Ces biens en série (1) reflètent également la diversité religieuse et sociale qui caractérise Djerba. Qu’il s’agisse des mosquées, telles que Sidi Salem, Abou Messouer ou encore Tajdit, de la synagogue La Ghriba ou de l’Eglise Saint Nicolas, chaque monument raconte une facette de l’histoire de l’île et de ses habitants.
Cette consécration de Djerba ne fait que confirmer l’importance de préserver et de valoriser notre patrimoine, reflet de notre histoire et de notre identité.
Elle vient honorer le travail des institutions tunisiennes et de la société civile djerbienne (Association de sauvegarde de l’Ile de Djerba) et elle confirme la valeur universelle exceptionnelle de Djerba, décrite comme « un témoignage d’un mode d’occupation d’un territoire insulaire. Ce bien en série est le témoignage d’un schéma de peuplement qui se développa sur l’île de Djerba autour du IXe siècle dans un environnement semi-aride et déficitaire en eau. Sa principale caractéristique était une densité faible : elle impliquait le découpage de l’île en quartiers regroupés économiquement autonomes, reliés les uns aux autres, ainsi qu’aux lieux de culte et de commerce de l’île, par un réseau de routes élaboré. Issu d’une combinaison de facteurs environnementaux, socioculturels et économiques, le schéma distinctif de peuplement et d’occupation des sols de Djerba illustre la manière dont les populations locales ont adapté leur mode de vie aux conditions et à leur environnement naturel pauvre en eau. ».
La gestion des biens en série est assurée par l’autorité locale, en la qualité des trois communes de Djerba, à savoir Houmt-Souk, Midoun et Ajim, sur avis technique et scientifique de la Commission nationale du patrimoine, de l’Institut National du Patrimoine (INP) et de l’Agence de Mise en Valeur et de Promotion du Patrimoine Culturel (AMVPPC).
La protection effective des biens immobiliers inscrits sur la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO doit être renforcée par la mise en application exhaustive des différentes techniques spécifiques prévues par le Code du patrimoine.
Émettons l’espoir que cette reconnaissance de la valeur universelle exceptionnelle des biens en série de l’île puisse contribuer à son développement socio-économique et incitera les autorités et communautés locales à œuvrer pour sa préservation et à s’engager davantage pour le renforcement de la protection juridique des biens, des mesures de conservation et la gestion efficiente du sur-tourisme.
Article paru dans Archibat n°59 – Octobre 2023