Driss Kettani, Mohamed Amine Siana, deux jeunes architectes marocains de talent, se sont distingués en remportant, avec leur partenaire Saad El Kabbaj, le premier prix de l’Archmarathon Awards 2015 dans la catégorie Éducation, pour l’École Supérieure de Technologie de Guelmim. et celui du Mediterranean Mimar Sinan dans la catégorie senior rive sud, Diplômés de l’école d’Architecture de Rabat, installés à Casablanca depuis 2005, ces architectes revendiquent une contemporanéité ancrée dans le contexte, en prise avec la mémoire des lieux, en appui sur une tradition architecturale vernaculaire millénaire. Surfer sur cette ligne de crête, sans tomber dans la nostalgie, est une véritable gageure, nécessite de la mesure, de la sensibilité et une certaine adresse. Le jeune trio relève le défi avec brio. Les deux maisons que nous présentons ici témoignent de cet art de l’équilibre qu’ils manient avec dextérité.
Situation : Casablanca
Etudes-réalisation : 2013 – 2016
Architecte : Driss Kettani
Collaborateurs : Yassine El Aouni et Rachid El Maataoui
Paysagiste : Atelier Bertrand Houin
Cette villa jumelée occupe une parcelle orientée nord-sud. La disposition est, en quelque sorte, prédéfinit l’obligation de mitoyenneté avec la maison voisine existante et la règlementation concernant les retraits. Présentant une façade sur rue aveugle, elle ouvre totalement, au contraire, ses façades latérale et sur jardin au sud.
L’orientation nord désavantageuse sur la rue et la présence de hauts murs d’enceinte sont ici l’occasion de revisiter certains des codes de la maison traditionnelle tout en ménageant une transparence et une fluidité spatiale. Ces codes s’appuient sur un contraste celui de la perspective sur le ciel, à travers le patio, doublée de la protection de l’intimité des habitants à travers un parcours d’entrée élaboré, d’épaisses parois de maçonnerie percées d’ouvertures plutôt étroites et munies de nombreux dispositifs de filtrage (claustra de bois, voilage, rideau…).
Une entrée en chicane, soulignée par un jeu de murs noir et en zellige gris-bleu, accentue cette dualité et renforce l’effet de contraste entre l’intimité et la discrétion sur la rue et l’ouverture et la transparence sur la piscine et le jardin. Ce principe est décliné au niveau de l’aménagement paysager, à travers trois séquences, le jardin minéral à l’entrée, le bassin sur le côté latéral et le jardin végétal au sud.
À l’intérieur, un panneau/cheminée en bois occulte la zone de services tout en ménageant une fluidité d’usage. Ce panneau intègre un écran de lattes en bois dont l’opacité varie selon l’angle de vue et rythme le regard. Intimité et transparence, fluidité d’usage et servitudes fonctionnelles, le projet joue sur les contrastes.
Il déploie une palette de matériaux nobles, bruts, qui déclinent des textures et des couleurs différenciées se combinant à la végétation dans une composition abstraite sur la rue.
Texte : Alia Ben Ayed – Photos : © Fernando Guerra
Article paru dans Archibat n°41 – Août 2017