Présentez-vous SVP ?
Je m’appelle Montassar DHIAF, 29 ans, architecte naval et ingénieur maritime, cette double formation m’a permis de fonder NAUTILUS INTERNATIONAL que je dirige actuellement. Je suis expert auprès des autorités maritimes tunisiennes et aussi commissaire d’avarie auprès de la Fédération Tunisienne des assurances FTUSA.
Pouvez-vous nous parler de votre cursus académique et professionnel ?
Après avoir obtenu mon diplôme national d’architecte de l’ENAU, j’ai suivi un double cursus en architecture navale et en ingénierie maritime par alternance entre l’école nationale supérieure d’Architecture de Paris et l’école nationale supérieure des techniques avancées de Brest.
Curieux de nature sur des sujets très variés, ayant l’envie d’apprendre et de comprendre le monde qui m’entoure, j’étais très motivé par les défis théoriques, techniques, et réglementaires qu’apporte tout nouveau projet naval, c’est dans ce sens que j’ai accepté le défi du SIEMENS LMS pour mon sujet de PFE. Il s’agit d’avoir en plus de la technicité en architecture navale les compétences dans la programmation en Python afin de développer un démonstrateur de simulation navale.
A l’obtention de mon diplôme j’ai préféré rentrer à Tunis pour rejoindre une équipe civile-militaire dans le cadre d’une coopération privé/ public afin de réaliser les premiers patrouilleurs militaires.
Suite à ça, j’ai eu l’idée en 2018, de lancer ma propre boite d’études, expertises et affaires maritimes NAUTILUS qui a fait ses preuves depuis, dans les marchés publics et les projets à l’échelle internationale.
Pouvez-vous définir le profil d’architecte-naval ?
L’architecte naval est un créateur technique et artistique de toutes sortes d’embarcations flottantes : comme les navires ou bien fixe comme les plateformes pétrolières offshore. Il est le chef d’orchestre, car il développe des projets maritimes tout en pensant design, structure, hydrostatique, hydrodynamique, et tenu à la mer.
Grâce à la maîtrise de tous ces paramètres, le maître d’œuvre prépare ses projets et les met en réalisations navales et maritimes.
Doit-on se spécialiser après le diplôme d’architecte pour avoir ce titre ?
Que ce soit le statut d’architecte ou celui d’ingénieur de formation, tous deux doivent avoir ce titre moyennant une formation spécialisée sur une durée de deux ans à l’étranger.
Ce genre de formation est organisé généralement en 4 semestres incluant 3 semestres académiques et un semestre de projet de fin d’études en milieu professionnel ou académique. Elle intègre tous les aspects de la conception navale commençant par le calcul de structures et de stabilité, passant par la manœuvrabilité jusqu’à la propulsion et la résistance à l’avancement.
A quel moment de votre cursus avez-vous décidé de suivre ce chemin ?
Lors de mon mémoire de fin d’étude en cinquième année d’architecture, j’ai choisi de traiter le sujet des plateformes pétrolières délaissées. En effet le démantèlement des plateformes pose des problèmes énormes sur deux plans, temporaire et budgétaire. J’ai jugé utile alors, de transformer ces lieux abandonnés en espaces favorables aux activités humaines. Durant mes études et mes recherches afin de répondre convenablement à cette problématique je me suis trouvé face à des contraintes techniques très avancées que mon profil d’architecte ne suffit pas à les résoudre ; d’où était la nécessité de découvrir ce monde et de me lancer dans une formation spécialisée en architecture navale, ingénierie maritime et offshore.
Quelles doivent être les qualités de ce profil d’architecte ?
Les valeurs nécessaires pour être un architecte naval sont, tout d’abord le sérieux, et la précision car la conception de ces produits nécessite un degré élevé de sécurité où il n’y a pas de place aux fautes ni aux mauvais calculs. Deuxièmement le dosage harmonieux entre la science et l’art, un architecte naval c’est l’artiste qui dessine ses œuvres avec les équations. Troisièmement, être à jour, par rapport aux nouvelles réglementations, aux nouvelles innovations, et/ou aux nouvelles contraintes techniques. Finalement l’amour de la mer l’emporte pour réussir son projet.
Cette spécialisation est-elle assez développée en Tunisie ?
Quels sont les débouchés sur les marchés tunisien et étrangers ?
En Tunisie, il y a une petite communauté d’architecte naval et d’ingénieur maritime, et cela est dû à plusieurs raisons : tout d’abord le manque des écoles de formation pour cette spécialité dans notre pays et le coût élevé de la formation à l’étranger. De plus, la formation en ingénierie maritime par exemple est une branche d’étude dédiée seulement au secteur militaire. Néanmoins, le ministère de l’enseignement supérieur ne donne pas l’équivalence pour les diplômés dans cette spécialité. Espérant qu’avec la création du nouveau secrétariat des affaires maritimes en 2020, les autorités vont prendre en considération l’importance et la nécessité de cette branche d’études.
Encouragerais-tu nos jeunes architectes à se spécialiser après obtention de leurs diplômes ?
Bien évidemment que j’encourage tout jeune diplômé ayant les qualités nécessaires et la passion de ce métier pour suivre son rêve et par conséquent élargir notre communauté. Les diplômés de cette de formation occupent des fonctions d’architecte naval, chef de projet, ingénieur d’étude, de recherche, d’affaires ou encore chef de chantier naval.
Selon vous la formation d’architecte doit-elle inclure un contenu pédagogique spécifique à l’architecture navale ?
Oui pourquoi pas, nous pouvons proposer des modules optionnels d’initiation à l’architecture navale pour donner un avant-goût aux étudiants et les familiariser à ce domaine. Ces modules seront composés des principes fondamentaux de l’architecture navale à savoir le boucle navire, la représentation graphique et technique et une initiation sur les bases de la stabilité à l’état intact…
Un mot pour nos futurs architectes ?
Chers futurs architectes, vous êtes les concepteurs de nos futurs projets, n’hésitez pas à faire la conception de votre projet de vie. Vivre sans objectifs c’est vivre comme un mourant. Essayez de sortir de la troupe et de concevoir votre propre chemin. L’architecture est certes notre point de départ commun, mais c’est à vous de définir votre point d’arrivée.
Article paru dans Archibat n°51 – Avril 2021