Sarra Karoui porte la passion et la vision de Sousse, une ville du bonheur. Elle consacre à ce projet tout son temps et son énergie et a su communiquer son enthousiasme à toute l’équipe qui l’accompagne.
Comme la plupart des grandes villes tunisiennes, Sousse souffre de nombreux dysfonctionnements à l’échelle urbaine et en particulier de problèmes de congestion, quels sont les principaux enseignements que vous avez tirés des diagnostics élaborés de la ville?
Le premier des dysfonctionnements de Sousse concerne le déséquilibre entre le nord et le sud de la ville. Le sud étant plus défavorisé que le nord. Le diagnostic, qui a touché jusqu’aux petits quartiers, a permis de définir les carences et les besoins particuliers en équipements divers : santé, éducation, loisirs… Il nous a permis d’autre part d’identifier les endroits précis où installer ces équipements. Toute notre démarche tournant autour de la ville du quart d’heure, qui rompt avec la cité dortoir.
Parmi les études urbaines programmées au cours de cette première phase du Pdui, la révision du Plan d’aménagement urbain de Sousse. Comment avez-vous procédé pour le réaliser ?
Nous avons tout d’abord procédé à la mise en place d’un diagnostic minutieux de la ville. Dans cet état des lieux chiffré de Sousse, tous les services régionaux ont été mis à contribution. Cette phase de collecte des données ne s’est pas faite sans difficultés, vu la longue période de crise sanitaire par laquelle est passée notre pays et la non-numérisation des données et statistiques. Aujourd’hui, un portail de la ville présente tout ce travail et expose les diverses données. Par la suite, la phase de concertation a donné lieu à une série d’ateliers avec les opérateurs sociaux et économiques, les universités, les écoles, les habitants des quartiers. Nous avons interpellé les différents âges tout en faisant attention à la dimension genre. Des sondages d’opinion ont été distribués pour interroger les populations sur l’aménagement de la ville, les hauteurs à respecter, les routes, la piétonisation… Une synthèse des réponses des citoyens en a découlé. Les scénarios du Plan d’aménagement urbain sont le fruit d’un mix entre les préconisations et les recommandations de la concertation et les résultats des études urbaines réalisées dans le cadre de la première phase du Pdui.
Justement, que pensent les citoyens du processus de piétonisation de la corniche ?
Les premières réactions sont très positives. Au cours des deux derniers dimanches, des musiciens sont venus se reproduire sur la corniche piétonnisée. Une course de vélo en solo et en tandem l’a investie en toute liberté. Cette action se poursuivra jusqu’au mois de juin. Nous avons également réalisé des micro-trottoirs pour sonder l’avis des citoyens sur cette opération de mobilité douce. Nous voulons donner une nouvelle vie à notre ville, un nouveau souffle, transformer cette ville devenue inhospitalière, bruyante, chaotique et vétuste en cité accueillante, moderne, résiliente et inclusive. Une cité où il plaît de vivre.
Au cours de la deuxième phase du Programme, il est question de travailler sur le Grand Sousse. Comment sera concrétisée cette vision et comment envisagez-vous la gouvernance de ce projet ?
En Tunisie, nous vivons depuis onze ans un apprentissage de la démocratie ainsi que du processus de gouvernance locale. L’intercommunalité se trouve au cœur même de cette gouvernance. Nous avons signé dernièrement une charte avec les présidents des communes de Sousse. C’était la fête. Car le Pdui les concerne tous. La deuxième phase du programme va profiter aux villes voisines qui bénéficieront d’une passation des savoir-faire et des projets communaux. Il s’agit d’une dynamique de concertation encadrée par les experts qui est en train de se mettre en place !
Propos recueillis par Olfa Belhassine
Source : La presse du 4/04/22