Lorsque la sculpture s’invite dans l’architecture, le volume devient un langage à part entière, jouant sur la force et la légèreté, le plein et le vide, pour façonner une identité architecturale marquante. Ce projet lauréat d’un concours national d’architecture, repose sur une conception sculpturale où des masses imposantes dialoguent avec leur environnement tout en intégrant des espaces de respiration sous forme de patios suspendus, tandis que l’utilisation de pierre tunisienne locale confère à l’ensemble une texture authentique et intemporelle, alliant rigueur, esthétique et fonctionnalité.
Fiche technique : Agence d’architecture Ajmi Mimita International Equipe projet : Selim Mimita, Sarra Khamassi, Adel Chouari, Meftah Abbes, Fadhel Mrabet, Issam Rekik, Bassem Trabelsi, Malek Amri, Yassine Ben Marzouk Agence d’architecture MOA Equipe projet : Mohamed Saâdi, Manel Mamou, Kouhbaïb Khaled, Maryem Louhaïchi, Cherifa Benouda, Anouar Gharbi Equipe Architecture, Société Tuniso-Koweitienne d'El Emar - STKE : Marwene Belhadj - Alya Ben Bouzid Un projet à l’échelle de son contexte : entre urbanisme, architecture et programmation
Implanté dans un site exceptionnel au cœur du lotissement La Perle du Lac, ce projet à usage résidentiel, bureautique et commercial tire parti d’un emplacement stratégique pour devenir un repère urbain incontournable. Sa conception s’appuie sur une analyse urbaine approfondie, mettant en lumière son potentiel et ses connexions avec le tissu environnant.
Au croisement d’une artère principale de 45 mètres de large, reliant le canal de la route N9 à la corniche du Lac, le projet s’inscrit dans une double lecture urbaine : une perception micro-urbaine, intégrée aux rues et aux aménagements pittoresques du quartier, et une perception macro-urbaine, offrant une signalétique forte visible depuis la route N9. Cette dualité impose un traitement volumétrique spécifique, assurant au bâtiment une présence affirmée à toutes les échelles.
Le projet s’organise autour d’un cœur d’îlot paysager, pensé comme un espace de vie semi-public favorisant l’animation urbaine. Les commerces et espaces de restauration bénéficient d’une terrasse aménagée, créant un cadre de vie agréable et attractif.
L’un des défis majeurs de cette conception repose sur l’équilibre entre deux fonctions distinctes : le résidentiel et le bureautique, chacune ayant ses propres exigences fonctionnelles et identitaires. L’harmonie est assurée par une matérialité cohérente, où la pierre, le verre et le paysage créent un lien subtil entre les volumes.
Les quatre bâtiments qui composent cet ensemble forment une porte d’entrée emblématique pour ce quartier en pleine expansion, renforcée par un socle commercial commun, véritable ancrage visuel et fonctionnel dans le paysage urbain de La Perle du Lac.


Pour une approche sculpturale des volumes
Notre approche se veut sculpturale dans la conception du volume pour concevoir une ligne architecturale contemporaine et épurée.
Cette approche sculpturale par des masses massives s’impose pour répondre à un besoin urbain afin d’assurer une présence et un caractère fort au projet aussi bien à partir des rues mitoyennes qu’à partir de la route N9.
Cette double lecture nous a incité à chercher une échelle imposante qui procure au volume un caractère et une présence dans le site et son environnement.
Un jeu de plein et de vide était donc recherché pour concevoir les espaces vides en tant qu’espace de respiration du volume mais surtout des lieux de vie dans les bureaux et les logements.
Ces espaces de respirations seront conçus comme des patios paysagers suspendus favorisant les lieux de détente et d’échange dans chaque bloc.
Une architecture de la matière
L’approche sculpturale ne saurait s’exprimer pleinement sans une pensée sur la matière.
Un choix devra être fait pour définir la texture qui saura accentuer ce jeu d’imbrication volumétrique. Nos différentes recherches élaborés précédemment notamment sur le projet de l’ambassade de Palestine au centre urbain nord, nous a permis de découvrir une palette assez large de pierre marbrière locale dans les teintes de beige et de gris (tel que la croûte de marbre de Thala, le travertin locale, la pierre de Foundouk Jedid …).
Notre choix se porte sur la pierre Tunisienne qui sera fixée sur des agrafes pour assurer une ventilation naturelle de la façade.
Dans nos différentes recherches et investigations aussi bien fonctionnelles que volumétriques, notre quête était à la fois de retrouver une ligne architecturale qui pourra exprimer un caractère, une présence et une identité architecturale forte face aux enjeux urbains de ce contexte.
Il saura aussi incarner sa vocation fonctionnelle d’immeuble de bureaux et d’habitations résolument épuré et contemporain.
Cette architecture de la matière, sculpté, composée par un jeu de plein et de vide exprimera un caractère solennel de rigueur et de dynamique.
Fonctionnellement, il saura apporter la polyvalence souhaitée pour répondre aux besoins des différentes structures professionnelles car son aménagement tient compte des fondamentaux normatifs des ergonomies des espaces de bureaux.



Le projet saura apporter un cadre paisible et privatif pour répondre aux attentes d’un bâtiment résidentiel de haute gamme.
Une pensée particulière est portée à l’œuvre de Louis Khan dans sa volonté d’aller au-delà des styles pour retrouver une architecture intemporelle. Comme il le décrit dans son livre, Silence et lumières : « il y a une troisième chose qui est encore plus importante, c’est l’esprit de l’architecture lui-même. Le miracle qu’un homme peut assumer, la responsabilité et l’amour pour l’émergence d’un monde à l’intérieur d’un monde. L’architecture en vérité c’est cela. C’est une chose tout à fait non mesurable. On réalise alors qu’un homme ne fait pas de l’architecture mais qu’il fait une œuvre d’architecture comme une offrande à l’architecture. L’architecture est un esprit qui ne peut jamais être satisfait, il est complètement insatiable. Il transcende tous les styles ; il n’est pas question de moderne puisque tout appartient à l’architecture, existe dans l’architecture et possède sa force. Cela c’est l’esprit de l’architecture. L’architecture ne connaît pas les styles. Elle ne connaît rien sauf sa présence, et elle est prête à recevoir une offrande qui soit vraie. Ainsi l’homme ne fait pas de l’architecture, il fait une œuvre d’architecture qu’il offre à l’architecture ».
Nous partageons avec Khan cette part de spiritualité pour aborder l’architecture. Nous espérons qu’à travers notre réponse architecturale avoir apporté notre part de vraie au projet.
Texte et documents graphiques : AM International – MOA
Article paru dans Archibat n°63 – Février 2025, vous pouvez le commander ou vous abonner en ligne : https://archibat.info/shop/
