Le 7 mai 2025, la troisième édition de la Biennale d’Architecture et de Paysage d’Île-de-France (Bap! 2025), l’événement architectural le plus important de France, a été inaugurée à Versailles. Cette édition est placée sous le commissariat conjoint de Sana Frini, du cabinet mexicain LOCUS, et de Philippe Rahm, du cabinet français PHILIPPE RAHM ARCHITECTES. Ils ont été sélectionnés pour diriger l’exposition principale à l’École Nationale Supérieure d’Architecture de Versailles (ÉNSA Versailles). L’exposition est ouverte au public à l’ÉNSA Versailles du 7 mai au 13 juillet 2025, du mardi au vendredi de 12h00 à 19h00, et le week-end de 11h00 à 19h00.

Intitulée « 4° Celsius entre toi et moi », l’exposition prend pour point de départ la déclaration officielle de l’ancien ministre français de la Transition écologique, Christophe Béchu, qui annonçait en 2023 que la France se prépare à une hausse de +4°C de la température moyenne d’ici 2100. Avec le réchauffement climatique, le climat tempéré de villes comme Paris devrait évoluer vers un climat subtropical — chaud et sec en été, doux et pluvieux en hiver — semblable à celui de certaines régions du sud du Mexique, de la Tunisie ou de la Corée du Sud.
Pour cet événement, les commissaires ont invité plus d’une douzaine d’universités à rechercher des solutions architecturales traditionnelles développées avant l’usage de la climatisation dans les climats chauds. Ils ont également rassemblé 58 agences contemporaines issues de latitudes chaudes et, à travers un appel à candidatures, sélectionné 15 architectes primés ayant imaginé une vision de Paris en 2100 dans des conditions de chaleur extrême et de fortes précipitations saisonnières. L’exposition est organisée en cinq séquences scénographiques :
LE MANIFESTE
L’exposition débute par une expérience sensorielle pour les visiteurs : la chaleur de Versailles sous un climat à +4°C en 2100. L’entrée se fait par l’espace entre la Nef Centrale et la Gypsothèque, où une salle entièrement tapissée de rideaux dorés à faible émissivité reflète la chaleur d’un lustre infrarouge. Deux films, réalisés par des artistes du nord et du sud de la Méditerranée, sont projetés de part et d’autre de ces rideaux, dialoguant autour du réchauffement climatique et de ses conséquences sur les glissements géographiques et culturels du sud vers le nord.
NEF CENTRALE
La nef centrale accueille l’exposition principale, déployée en trois sections longitudinales représentant trois temporalités liées à la géographie : passé, présent et futur. L’exposition est structurée transversalement autour de quatre éléments symboliques — l’eau, la terre, l’air et le feu — utilisés pour regrouper des problématiques architecturales et leurs solutions face aux pluies tropicales, inondations, sécheresses, refroidissement par évaporation, inertie thermique, effusivité, conductivité thermique, ventilation, convection thermique, rayonnement solaire, protection solaire, etc.
PASSÉ
Située le long du mur sud de la Nef Centrale, cette section prend la forme d’un cabinet de curiosités rassemblant des éléments historiques, géologiques et culturels issus de géographies chaudes : maquettes et analyses d’architectures vernaculaires, objets du quotidien, plantes, roches, et plus encore.
PRÉSENT
Cette section présente les œuvres d’architectes contemporains exerçant déjà dans des climats chauds. À travers dessins, maquettes et prototypes, ils partagent leurs réponses actuelles aux environnements thermiques dans leurs projets.
FUTUR
Installée le long du mur nord de la Nef Centrale, cette section propose une vision prospective. Le thème est Paris et la région Île-de-France en 2100 — ou plus largement, des villes du nord transformées par des conditions climatiques chaudes.
PAVILLONS
La Cour de la Maréchalerie accueille deux pavillons servant d’introduction visuelle à la Biennale.
Windcatcher / Colectivo C733
« Propose la lévitation de six cheminées solaires qui rafraîchissent l’espace grâce à un système de convection passive, tirant parti des températures estivales élevées de Versailles et des courants d’air naturels. Ces cheminées assurent le rafraîchissement grâce à leur conception géométrique et matérielle : elles captent l’énergie solaire par une surface vitrée au sommet, qui chauffe des parois intérieures en argile peinte en noir. Ce différentiel thermique, combiné à des ouvertures périphériques, active un flux convectif qui génère des courants d’air frais dans la partie inférieure du pavillon — là où les visiteurs circulent et se reposent. »
The Mud Trianon / Andrés Jaque OFFPOLIN
« Depuis deux millénaires, les dolia enfouies ont été utilisées dans les zones climatiques situées entre 35°N et 40°N de latitude pour réguler la température de contenus sensibles — vin, conserves, sépultures humaines. L’inertie thermique combinée de l’argile et de la terre accumulée, le refroidissement évaporatif permis par la structure poreuse de la céramique, et l’effet d’ombrage stabilisent la température de la terre contenue tout en absorbant l’énergie des corps, objets ou fluides placés à l’intérieur par rayonnement direct.
Le Mud Trianon active l’agencéité matérielle des dolia enfouies, les déplaçant à Versailles, à 48°48’18’’N, en réponse à la migration nordique des conditions climatiques induite par l’activité humaine. Les visiteurs sont invités à appuyer leur peau contre l’argile intérieure et à s’adosser aux parois courbes, s’engageant ainsi dans de nouvelles formes de confort climatique. »

COMMISSAIRES
Sana Frini I Architecte tunisienne basée à Mexico et cofondatrice de LOCUS (Mexico). Son travail porte sur les méthodes architecturales du Sud global, telles que les processus participatifs, les systèmes artisanaux, les post-vernaculaires, la réintégration locale et la résilience climatique. Avec LOCUS, Sana Frini a récemment réalisé plusieurs projets de régénération contextuelle, dont le premier bâtiment public à faible émission de carbone du Mexique, le premier restaurant zéro déchet d’Amérique latine et la première prison climatique ré-adaptative du continent. Elle a également été sélectionnée pour co-curer la Biennale d’architecture et de paysage d’Île-de-France 2025 (bap! 25) ainsi que pour faire partie de l’équipe du pavillon mexicain à la Biennale de Venise 2025. Elle a enseigné dans diverses universités internationales telles que Cornell University, Columbus et Kent University.
Philippe Rahm I Architecte suisse diplômé de l’École Polytechnique Fédérale de Lausanne et docteur de l’Université Paris-Saclay, dont le cabinet Philippe Rahm architectes est basé à Paris. Parmi ses projets, on compte le parc central de Taichung à Taïwan, inauguré en 2020 (avec Mosbach paysagistes). En 2023, il a publié les ouvrages Histoire naturelle de l’architecture, Climatic architecture et The Anthropocene Style. Il a enseigné à Harvard, Princeton, Columbia, à la HEAD – Genève et à l’ENSA Versailles. Il a participé à de nombreuses biennales, notamment celles de Venise (2025), Tbilissi (2024), Madrid (2024), Chicago (2023) ou Tallinn (2022). En 2025, il est commissaire des biennales d’Île-de-France et de Saint-Étienne. Il est chevalier de l’Ordre du Mérite Culturel de Monaco et a reçu la Médaille d’Argent de l’Académie d’Architecture de France.
PARTICIPANTS Architectes : Al Borde, Banduksmith, H&P Architects, Isla and Paparkone, Manuel Bouzas, Sealab, Septembre Architecture, Aziza Chaouni, Civil Architecture, Colectivo Warehouse, Hood Design Studio, Ignacio Urquiza y Ana Paula de Alba (avec Naso), Projectiles, Souleima Fourati, Takk, Worofila, Khristian Ceballos Ugarte, Andrés Jaque / Office for Political Innovation, APC, Roman Bauer Arquitectos, BIAS, Estudio Flume, HARQUITECTES, Lanza, Luo Studio, MAS, Max Von Werz, Modu, Salazar Sequero Medina, Shau, Tropical Space, Colectivo C377, alsar-atelier, Bajet Girarmé, Fleury Atallah Architectes, Gustavo Utrabo, Husos Arquitecturas, Natura Futura, New South, PontoAtelier, Rozana Montiel, Taller de Arquitectura | Mauricio Rocha. Critiques : Daniel Barber, Pierre Charbonnier, Beatriz Colomina, Rob Dunn, Pedro Gadanho, Béatrice Grenier, Lisa Heschong, Simone Horner, Gabriel Kogan, Eduardo Prieto, Carolyn Steel, Germán Valenzuela, Mark Wigley. Écrivains : Aurélien Bellanger, Marie Darrieussecq, Célia Houdart, Annie Lulu, Marielle Macé, Yamen Manaï, Samy Manga, Ryoko Sekiguchi, Peter Stamm, Abdourahman Waberi, Jean-Max Colard, Dominic Thomas. Lauréats de l’appel à candidatures : Clémence Althabegoïty + Catherine Romand, Victor Angelard + Baptiste Chauvin + Paola Franco, Méryl Benoist et équipe, Mária Bogárová, Bernadetta Budzik + Rachel Rouzaud + Burek Tomasz, Louis Cartier + Lucien Chartier Dalix, Xinyu Chen + Chentian Liu, Cookies, DoZa, Fabulism, GOA Arquitectura + Javier García-Germán, Make It Rain + brasebin terrisse, MLAV + UHO, OFICINAA + TRANSSOLAR, Same. Mentions honorables : A-roh architectes, Immanuel Bergmann + Lennard Gritzo + Lilou Günther, Gaël Biache, Leila Breen, Pablo Castillo Luna, Nichola Czyz + Vasilis Marcou Ilchuk, Carla Dissegna + Moritz Heuberger + Thore Terpilowski, Espace Disponible, Iris Hansen, Alessia Rapetti, Roofscapes Studio, Oscar Zamora + Mickey Chapa. Universités : Columbia University, Cornell University, École Nationale d’Architecture et d’Urbanisme de Tunis, ÉNSA Versailles, EPFL Lausanne, Haute école d’art et de design de Genève, National University of Singapore, Pontificia Universidad Católica del Perú, Sapienza Università di Roma, Texas Tech University, The Ohio State University, The University of Texas at Austin, UNAM. Réalisateurs : Derrick Belcham, Manuel Muñoz Rivas, Younes Ben Slimane. Partenaires : Ratti, Centre Culturel Suisse, ArchDaily, Design Hotels.
Article paru dans Archibat n°64 – Juin 2025, vous pouvez le commander ou vous abonner en ligne : https://archibat.info/shop/
